Salif Keita : une nostalgie chevillée au corps

Le chanteur Malien, Salif Keïta, seigneur de la musique Ouest-Africaine, va interpréter, lors de concerts dans plusieurs pays, jusqu'à fin juillet, les compositions de « Un Autre Blanc », son dernier disque paru fin 2018, empreint de nostalgie.    

Fer de lance d'une musique mandingue qu'il a su moderniser tout en préservant son caractère traditionnel, Salif Keïta l’a truffée de grooves et de phrasés mandingues, renvoyant au temps où, fils de noble, il avait bravé l'interdit de sa caste pour se faire chanteur.  

« Dans la musique, dit-il, il y avait à l'époque beaucoup plus d'âme, pas trop de machines, ce sont les gens qui jouaient ».

Sollicité par les plus grands (Cesaria Evora, Carlos Santana, Wayne Shorter...) au cours d'une riche carrière internationale,  Salif Keita a convié sur cet enregistrement quelques invités de marque: la Béninoise Angelique Kidjo, le groupe vocal Sud-Africain, Ladysmith, Black Manbazo et l'Ivoirien, Alpha Blondy.

Mais pour lui, l'essentiel n'est pas dans ces duos de prestige. Le coeur de sa musique bat ailleurs, sur le tonique « Were Were », les longues mélopées que sont « Syrie » ou « Tiranke », les entraînants « Tonton » et « Lerou Lerou ».

« La musique, ici, c'est du pur mandingue », se régale le chanteur : éclats des choeurs qui claquent, voix, gerbes de guitares, batterie agile, basse bondissante, kora chatoyante....

Pour construire son dernier disque dont il interprétera les chansons en concert de fin avril à fin juillet dans plusieurs pays, il a pris son temps: « Un autre blanc » arrive plus de six ans après « Talé », le précédent.

« Un autre blanc », son titre, fait référence à sa condition d'albinos, dont il a souffert dès la petite enfance.

« Les albinos sont diabolisés, stigmatisés, poursuivis tous les jours », déclare celui qui s'est réfugié dans le chant « parce que je ne pouvais rien faire d'autre ». Salif Keïta a été ostracisé en raison de sa différence et handicapé par une mauvaise vue l'ayant empêché de devenir instituteur.

 « Les albinos, poursuit-il, le sont aujourd'hui encore, d'une façon beaucoup plus discrète parce qu'on a commencé à en parler, à dénoncer, à créer des associations.

Il se pourrait bien qu'« Autre Blanc » soit le dernier disque de Salif Keita. « Je ne serai plus là pour composer dix morceaux pour faire un album, c'est certain », annonce-t-il d'un ton las, en plissant les yeux, fatigué par la lumière. 

« Pour moi, c'est un disque pour dire au revoir aux albums ». « Je ferai peut-être encore des collaborations, des morceaux isolés par ci par-là », ajoute cet  un homme de plus en plus casanier.

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