Le spectre d'une guerre commerciale domine la réunion du FMI et de la BM à Washington

Les réunions de printemps du FMI et du Groupe de la Banque mondiale se sont ouverts jeudi à Washington sur fond d’inquiétudes sur une possible guerre commerciale, alimentée par la montée du protectionnisme aux Etats-Unis et en Europe.

Le prêteur en dernier ressort a relevé mardi ses prévisions de croissance mondiale à 3,5% contre 3,4% prévu récemment mais a alerté sur les risques considérables qui continuent d’assombrir les perspectives à moyen terme.

La reprise qui prend forme reste vulnérable aux risques des mesures protectionnistes, qui entraînerait une guerre commerciale, met-il en garde.

L’incertitude pèse sur la croissance : le repli sur soi prôné par la nouvelle administration américaine pourrait freiner l’expansion économique mondiale et mettre à mal les relations commerciales internationales, a relevé le FMI dans son rapport sur les perspectives économiques mondiales.

Les mesures économiques et commerciales prises par les Etats-Unis, plus grand actionnaire des deux institutions de Bretton Woods, ont remis en cause le principe de libre échange et du multilatéralisme, obligeant les dirigeants du FMI à s’adapter avec une nouvelle ère économique.

Les Etats-Unis ne s’en cachent pas, leur secrétaire au Commerce, Wilbur Ross a affirmé que son pays était engagé dans une guerre commerciale depuis des décennies mais il est maintenant mobilisé à organiser ses troupes pour contre-attaquer.

Le retrait des Etats-Unis du partenariat transpacifique, la renégociation de l’accord de libre échange nord-américain ont été les premières actions entreprises dans le cadre de cette mobilisation qui n’exclut pas aussi le renforcement des barrières douanières.

 La Grèce et la monnaie chinoise s’invitent à la réunion

Le secrétaire américain au Trésor, Steven Mnuchin, a demandé au FMI de surveiller les pratiques chinoises en matière de taux de changes accusant la Chine de maintenir la valeur de sa monnaie à la baisse afin de doper ses exportations.

L’administration américaine est revenue vendredi sur ces accusations en affirmant dans un rapport du Trésor américain qu’aucun grand partenaire des Etats-Unis ne remplissait les critères définissant une manipulation des taux de change mais n’a pas renoncé pour autant à examiner la question minutieusement.

Selon la presse américaine, Mnuchin a focalisé durant plusieurs réunions qu’il a tenues avec la directrice générale du FMI, Christine Lagarde, sur la question épineuse de la dévaluation de la monnaie chinoise.

Les doléances américaines devraient inciter le Fonds à mettre l’accent sur les déséquilibres mondiaux en matière commerciale, ont indiqué de hauts responsables du FMI.

La politique protectionniste de Donald Trump pourrait infliger, par ailleurs, un sérieux coup à l’esprit de solidarité auquel le FMI appelle pour venir en aide aux pays sévèrement affectés par la crise économique.

Après la crise financière de 2008, le FMI a opéré un tournant décisif dans ses politiques financières en essayant de redéfinir son rôle dans l’économie mondiale et en s’intéressant davantage aux questions des inégalités économiques, du changement climatique et des laissés-pour-compte de la mondialisation.

Mais l’arrivée de Donald Trump au pouvoir risque de provoquer des tensions avec le prêteur de crise sur la prise en charge des pays lourdement endettés. La dette grecque sera le premier test dans ce sens.

L’Union Européenne, notamment l’Allemagne, veut que le FMI s’implique dans le dernier plan de sauvetage de la Grèce mais il n’est pas encore clair que l’administration Trump donne son accord à une telle proposition.

Le FMI a affirmé mercredi qu’il n’allait pas participer au renflouement de la Grèce que si sa dette est soutenable. Certains républicains s’attendent déjà à ce que Washington bloque la participation du FMI à tout programme de sauvetage de ce pays européen.

  L’augmentation du capital de la BM, un autre sujet de discorde

 Le programme expansif du président de la Banque mondiale, Jim Yong Kim, sera également au coeur du débat des réunions des institutions de Bretton Woods. Toutefois l’augmentation du capital de la BM devant accompagner ce programme fera certainement l’objet d’un échange de vues contradictoire.

Les Etats-Unis s’opposent à cette augmentation et annoncent déjà leur intention de réduire les fonds versés au Groupe de la Banque mondiale et à ses filiales chargées du développement régional.

Une opposition pareille mettrait à mal la BM qui fait face à une demande de prêts grandissante notamment de la part des pays exportateurs de matières premières, en difficulté financière.

Certains observateurs prédisent déjà que le débat sur ce sujet soit suspendu lors de cette réunion en raison des grandes divergences pouvant miner les discussions.

Washington a annoncé la couleur le mois dernier quand le sous secrétaire au Trésor américain, chargé de la finance internationale, Adam Lerrick, a appelé la BM à cesser de prêter aux pays à revenus moyen comme la Chine. APS

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