Le chef du gouvernement tunisien désigné, Habib Essid, annoncera lundi, la composition définitive de son cabinet, et ce après de longs pourparlers avec les principaux partis politiques dont certains ne seraient pas d'accord sur le principe d'un gouvernement d'union.
Les concertations sur la formation du prochain gouvernement Essid ayant pris fin vendredi n'ont pas débouché sur un accord permettant de former un gouvernement d'union, rapporte l'agence de presse tunisienne TAP qui affirme l'annonce le 2 février de la composition du nouveau cabinet.
Une fois dévoilé, le nouveau gouvernement sera soumis au vote de confiance, des députés à l'Assemblée des représentants du peuple (ARP) mercredi 4 février, précise la même source.
M. Essid a eu jeudi des entretiens avec des représentants et dirigeants des partis politiques, dont Rached Ghannouchi, Taieb Baccouche, Slim Riahi et Kamel Jendoubi, des organisations et des personnalités nationales, mais aussi avec des composantes de la société civile.
Ces concertations s'articulent autour du programme du gouvernement pour la prochaine étape, sa composition ainsi que les enjeux majeurs de la prochaine étape en Tunisie.
Un gouvernement d'union n'"a pas de sens" en ce moment
Selon Taieb Baccouche, secrétaire général de Nidaa Tounes, la nouvelle équipe ne sera pas un gouvernement d'union nationale groupant tous les principaux partis.
Un gouvernement d'union nationale n"'a pas de sens en ce moment", a fait remarquer Baccouche dans une déclaration de presse. "La place des uns est au gouvernement et celle d'autres dans l'opposition", a-t-il ajouté.
La participation du parti Afek Tounes, aux cotés de Nidaa Tounes, de l'Union patriotique libre (UPL) et de personnalités de la société civile, se confirme, a indiqué Baccouche, alors que celle du mouvement Ennahdha est peu probable, a-t-il fait remarquer, ajoutant que cette question fait encore l'objet de discussions.
Pour sa part, le président du parti Ennahdha, Rached Ghannouchi a déclaré que les pourparlers ont atteint un stade avancé mais sans parvenir au résultat escompté : celui de former un gouvernement d'union nationale auquel participent tous les grands partis.
Candidat de Nidaa Tounès, le parti de M. Caïd Essebsi, vainqueur des législatives de fin octobre, M. Essid avait été chargé par le président de la république de former un gouvernement le 5 janvier.
Il y a lieu de rappeler que le Premier ministre désigné Habib Essid, un indépendant, avait déjà présenté un gouvernement composé de 24 ministres et 15 secrétaires d'Etat comprenant neuf femmes, mais qui n'a pas obtenu la confiance de l'ARP.
Le Premier ministre désigné, un "indépendant" qui fut ministre de l'Intérieur après la révolution de 2011, avait présenté le 23 janvier au président Béji Caïd Essebsi un gouvernement "de compétences nationales" dont Ennahda, deuxième force politique du pays, est absent, tout comme le Front populaire.
Plusieurs portefeuilles ministeriels comme les Affaires étrangères et la Santé reviennent à Nidaa Tounès.
D'autres comme le Tourisme et la Jeunesse et les sports échoient à l'UPL, parti de l'homme d'affaires et patron de club de foot, Slim Riahi, troisième force au Parlement avec 16 sièges sur 217.
Pour entrer en fonctions, le gouvernement doit obtenir le soutien d'au moins 109 députés. Or Nidaa Tounès ne dispose que de 86 sièges, et plusieurs partis ont annoncé qu'ils n'accorderaient pas leur confiance à la liste proposée.
Dissolution de l'Assemblée en cas de blocage
Selon la Constitution tunienne, si le gouvernement n'obtient pas la confiance du Parlement, le président Béji Caïd Essebsi se verra obligé de charger encore une fois M. Essid de former une nouvelle équipe. Dans le cas où aucun gouvernement n'obtient la confiance de l'Assemblée quatre mois après la désignation du premier candidat au poste de chef de gouvernement, le président de la République aura le pouvoir de dessoudre le Parlement.
Les électeurs tunisiens seraient alors appelés aux urnes pour élire une nouvelle Assemblée. Des élections législatives seront convoquées dans un délai ne dépassant pas les 90 jours.
Il faut admettre que rien ne garantit, à la lumière des déclarations des parties mécontentes, que le prochain gouvernement obtiendra la confiance du Parlement
"Si le gouvernement reste sous sa forme actuelle, nous ne lui accorderons pas la confiance, car il ne représente pas les ambitions des Tunisiens (qui veulent) un gouvernement (...) capable de faire face aux grands défis et de prendre des décisions difficiles", avait déclaré à des journalistes Rached Ghannouchi, le président d'Ennahda (69 sièges).
"Nous aurions voulu que ce soit un gouvernement d'union nationale", a-t-il ajouté, en disant espérer "davantage de consultations afin de parvenir à des ententes sur la composition du gouvernement et son programme, de manière à ce qu'il obtienne une large majorité une fois présenté à l'Assemblée".
Le Front populaire (15 sièges), le parti libéral Afek Tounes (huit sièges) et Moubadara (trois sièges) avaient également annoncé qu'ils ne voteraient pas la confiance au gouvernement.
Le Premier ministre sortant Mehdi Jomaa a présenté la démission de son gouvernement au président Caïd Essebsi, qui l'a acceptée en le chargeant de gérer les affaires courantes jusqu'à l'entrée en fonctions du nouveau gouvernement.