Depuis quelques mois, les pêcheurs de la communauté de la région de Valence, à l’est de l'Espagne, collectent systématiquement les déchets en polyester saturé (PET) en Méditerranée, destinés à être recyclés en une collection de mode exclusive.
« En juin, à Florence (Italie), nous voulons présenter la première collection de mode réalisée avec du fil et des tissus issus des déchets du fond de la Méditerranée », annonce l'Espagnol Javier Goyeneche, 45 ans, président d'Ecoalf.
Cette entreprise Madrilène lancée en 2010 et comptant 18 employés, avec 4,5 millions d'euros de chiffre d'affaires en 2015, se flatte déjà d'avoir créé une nouvelle génération de vêtements et d'accessoires à partir de bouteilles en plastique collectées sur terre, de vieux filets de pêche ou de pneus usagés.
« Là où d'autres voient des ordures, dit-il, nous voyons une matière première à transformer en tissus à travers des processus sophistiqués de recherche et développement », explique M. Goyeneche, dont les doudounes ou sacs à dos sont vendus dans des magasins huppés, tels Harrods à Londres et Bloomingdale's à New York.
En 2010, environ 8 millions de tonnes de déchets en plastique ont été déversées dans les océans, selon une étude internationale publiée en février dans la revue Science.
la Méditerranée est la sixième grande région d'accumulation de déchets plastiques de la planète, ont averti en avril des scientifiques de l'Université de Cadix (Andalousie, sud).
« La bouteille en plastique est un problème social car, en Espagne, 4 millions de bouteilles sont jetées chaque jour », assure Gabriel Buldu, directeur commercial de PET compania (filiale de l'Italien Dentis), une des grandes entreprises de recyclage du pays.
C'est dans son usine de Chiva, près de Valence (est), que seront transformées en décembre les premières tonnes de déchets collectés par les pêcheurs.
Visiter cette usine est une leçon d'écologie : le processus de recyclage est si complexe qu'aucun visiteur ne jettera plus un emballage plastique avec la même légèreté qu'auparavant.
Secouées, aplaties, échaudées, les bouteilles sont triées par des machines ou par une ouvrière debout face au tapis roulant, puis triturées dans des mixeurs géants pour finir en minuscules flocons.
En janvier, ces déchets issus de la mer seront transformés en fil par la société espagnole Antex, à Girona (Catalogne, nord-est). Puis Ecoalf pourra créer sa collection - de maillots de bain, vestes, sacs, chaussons... D'abord avec 35% de déchets plastiques d'origine marine et 65% d'origine terrestre, précise M. Goyeneche.
A terme, il voudrait obtenir un fil recyclé à 100% à partir de détritus collectés en mer. Une façon de « faire prendre conscience aux gens de ce qui se passe au fond de la Méditerranée ».