Des incidents ont éclaté samedi à Paris lors d'une marche pour les libertés dans le cadre d'une journée nationale de manifestations, au lendemain d'une intervention du président Macron visant à apaiser la colère suscitée par des violences policières et par un texte de loi sur la sécurité.
Des voitures ont été incendiées et plusieurs vitrines brisées à l'avant du cortège, qui a démarré dans le nord de Paris sous haute surveillance policière, une semaine après une précédente manifestation parisienne qui s'était achevée avec de violents heurts.
Des projectiles ont été lancés sur les forces de l'ordre qui ont répliqué en faisant usage de gaz lacrymogènes, selon l'AFP.
22 personnes ont été interpellées, selon le ministère français de l'Intérieur.
Des rassemblements ont également eu lieu à Toulouse (sud-ouest), à Montpellier (sud), à Rennes (ouest) et Strasbourg (est). Certaines villes craignent de nouveaux débordements violents.
A Bordeaux et Montpellier, les préfets ont interdit tout cortège dans l'hypercentre.
A Lyon, la manifestation n'est autorisée que sur la rive gauche du Rhône.
Au total, une centaine de rassemblements sont prévus dans tout le pays, avec pour mots d'ordre la défense des droits sociaux et celle des libertés.
Initialement prévue comme un rassemblement syndical contre la précarité, traditionnellement organisé par le syndicat CGT le premier samedi de décembre, la journée a en effet vu s'agréger la contestation contre les violences policières et la loi sécurité globale, qui mobilise les défenseurs des libertés depuis plusieurs semaines.
Un texte qui "porte atteinte à la liberté". Le texte prévoit un encadrement de la diffusion d'images de policiers en opération, et ses détracteurs estiment qu'il porte atteinte "à la liberté de la presse, à la liberté d'expression et à la liberté de manifester", et va instaurer "des outils de surveillance de masse".
Les manifestants entendent aussi dénoncer les violences policières après deux affaires fin novembre qui ont provoqué une onde de choc en France: le passage à tabac d'un producteur noir - pour lequel 3 policiers ont été inculpés - et l'évacuation brutale d'un camp de migrants à Paris.
"En deux ans, j'en ai vu des violences, c'est anormal qu'on ne puisse pas filmer", a déclaré à l'AFP Nadine, une "gilet jaune", mouvement de contestation sociale né fin 2018 marqué par des manifestations régulières pendant plus d'un an, dont certaines très violentes.
"Il n'y a pas opposition entre les libertés publiques et individuelles et le fait de se battre contre la précarité et le chômage, surtout dans la période", a estimé le secrétaire général de la CGT Philippe Martinez dans le défilé parisien.
"Si on n'a pas de liberté pour manifester, si la presse est muselée, comment allons nous défendre nos droits?", a abondé Murielle Guilbert, co-déléguée générale du syndicat Solidaires.
Accusé de multiplier les mesures "liberticides", Emmanuel Macron a tenu vendredi à s'adresser directement aux jeunes, très présents lors des dernières manifestations, dans un entretien au média en ligne Brut vendredi."Je ne peux pas laisser dire qu'on réduit les libertés en France", a affirmé le président.
"C'est un grand mensonge. On n'est pas la Hongrie ou la Turquie".
Le chef de l'Etat a prôné l'apaisement, en dénonçant à la fois les violences de certains policiers et celles commises contre les forces de l'ordre.
"Je n'ai pas de problème à répéter le terme de violences policières mais je le déconstruis", car "c'est devenu un slogan pour des gens qui ont un projet politique", notamment "l'extrême gauche" selon lui.
M. Macron a également expliqué vouloir regarder en face la question des contrôles au faciès.
Il a promis le lancement en janvier d'une plate-forme nationale de signalement des discriminations, gérée par l'Etat, le Défenseur des droits et des associations. Les caméras-piétons pour les policiers seront parallèlement généralisées.
Des propos qui ont fait bondir les principaux syndicats de gardiens de la paix, qui ont appelé samedi à cesser les contrôles d'identité.