Au-delà des statistiques du cancer toujours grandissantes, le Pr Mourad Abid, président de la Société algérienne de chirurgie digestive et hépatobiliaire (AACDHB) souligne, ce mercredi matin, dans l’Invité de la rédaction de la Chaine 3 de la Radio Algérienne, les conséquences sociales et financières induites par cette maladie. « Regardons autour de nous, il n’y a pas une famille qui n’est pas atteinte, de près ou de loin, par un proche qui a eu le cancer, qui est décédé du cancer ou qui est en cours de traitement contre le cancer. » Il appelle à une meilleure mise en œuvre du plan cancer.
Pour le Pr Abid, l’augmentation constante des cas de cancer montre « à quel point cette pathologie est en train de prendre une grande ampleur, avec des conséquences sociales et financières pour la prise en charge des patients ». Le spécialiste relève le poids financier pour l’Etat et pour les personnes atteintes. « Même s’ils sont pris en charge par les différentes structures hospitalières de l’Etat, beaucoup d’examens complémentaires tels que les IRM, scanner et bilans biologiques sont faits dans le privé et sont à la charge du patient. »
« Tout cela fait que le cancer est un problème que l’on devrait prendre beaucoup plus au sérieux », interpelle le Pr Abid, qui estime que « le véritable problème du plan cancer actuellement c’est sa mise en œuvre ».
Même s’il avoue que la première version du plan cancer, élaborée dans l’urgence en 2012, alors que l’Algérie connaissait de grandes difficultés pour répondre à la demande de radiothérapie, n’était pas au point, le Pr Abid rassure : « ce plan a fait l’objet d’une évaluation par les autorités et par le Pr Zitouni qui a été ensuite désigné comme coordinateur pour justement réaliser un véritable plan cancer. »
Pr Abid : « On ne parle de dépistage que lorsqu’on est au mois d’octobre rose »
Pour autant, le spécialiste met en garde : « le plan cancer reste, à ce jour, un document parfaitement intéressant, sauf qu’il risque, si on continue comme ça, de terminer dans un tiroir comme de nombreux autres plans en Algérie. »
Il insiste sur la nécessité de mettre en application ce plan, notamment son volet dépistage. « On ne parle de dépistage que lorsqu’on est au mois d’octobre rose, ou à l’occasion du mois de mars bleu pour le cancer colorectal, mais entre temps, il ne se passe pratiquement rien », regrette le Pr Abid.
« L’Algérie a fait un bond extraordinaire en termes de prise en charge du cancer, mais il n’y a pas encore de maturation de cette politique », constate encore le spécialise.
Il relève des disparités dans l’implantation des centres anti-cancer et des accélérateurs pour la radiothérapie à travers les différentes wilayas du pays. Il cite à titre d’exemple la capitale. « Alger ne compte que 3 accélérateurs pour une population de plus de 3 millions d’habitants, alors qu’une wilaya comme Béchar qui compte 600 mille personnes dispose également de 3 accélérateurs. Or, l’OMS préconise un accélérateur pour 500 mille habitants ». Face à ce constat, le Pr Abid appelle à réduire la part de la bureaucratie dans la gestion des structures de santé.