L’avant projet de loi de réforme du secteur de la santé sera présenté, prochainement, au Conseil des ministres. A présent, il est soumis au débat au niveau du département d’Abdelmalek Boudiaf. Si le ministère rassure que cette réforme mettra les établissements hospitaliers et les différentes structures de santé sur la voie de la modernisation, les syndicats des différentes corporations de la santé publique contestent la mouture «dans le fond et dans la forme». Que contient cet Avant projet de loi ? Comment les responsables comptent réorganiser et redynamiser le secteur ?
Activité complémentaire limitée à 20% de l'activité hebdomadaire
La durée de l'activité complémentaire des médecins ne peut excéder 20% de l'activité hebdomadaire du service concerné, propose l'avant projet de loi relative à la santé, qui suggère également que le nombre d'actes effectués au titre de cette activité ne peut dépasser 20% de ceux exercés au titre de l'activité publique.
L'avant projet de loi explique que cette activité complémentaire "s'exerce en sus de la durée légale et en dehors des horaires du service et pendant les week-ends sous le contrôle de la direction de l'établissement public de santé concerné".
Expliquant l'activité complémentaire, le nouveau texte souligne, dans son article 273, qu'elle est instituée au profit des fonctionnaires de santé durant les week-ends et après les heures légales du travail dans les établissements publics de santé à l'exclusion de toutes autres structures.
"Elle peut être assurée dans des structures de santé privées par des professionnels ayant le statut de contractuel", ajoute, cependant, le même article. Selon l'avant projet de loi, l'activité lucrative est maintenue au profit des professionnels de santé selon la règlementation en vigueur et sur la base d'un contrat entre l'établissement d'origine du professionnel de santé concerné et l'établissement et la structure cocontractante.
L'article 274 de ce nouveau texte précise que l'activité complémentaire comprend les actes, les gestes médicaux, chirurgicaux et autres.
"Elle est exercée au sein de l'établissement public de santé sur la base d'un contrat interne entre l'établissement et l'équipe soignante concernée", indique le texte.
L'avant projet de loi explique, en outre, que l'activité complémentaire au sein de l'établissement public de santé est assurée par les professionnels de la santé ayant la qualité de fonctionnaire et exerçant leurs activités au sein de l'établissement concerné.
Elle peut être également exercée par des professionnels de la santé ayant le statut contractuel, les professionnels de nationalité étrangère et les professionnels installés à titre privé sur la base d'un contrat définissant les obligations des deux parties et prévoyant les sanctions en cas de manquement d'obligations de ces professionnels.
Dans son article 279, le texte stipule que lors de l'accomplissement des actes entrant dans le cadre de l'activité complémentaire, la responsabilité des professionnels de la santé concernés est engagée, soulignant que tout manquement aux obligations prévues par la même loi est considéré comme "faute disciplinaire grave de 3° degré".
L'autorisation d'exercice de cette activité peut être suspendue ou retirée par le chef d'établissement public de santé en cas de rupture constatée des clauses contractuelles et du cahier des charges et/ou de nécessité service, indique, par ailleurs, l'avant projet de loi dans son article 280.
Interdiction de vente du tabac et des boissons alcoolisées aux mineurs
La vente du tabac et des boissons alcoolisées aux mineurs et toute forme de publicité à ces produits. Dans son chapitre IV sur les problèmes de santé particuliers et grands fléaux sociaux, le projet de loi note dans l'article 93 que "la vente de tabac ou produits du tabac aux mineurs est interdite".
La vente de boissons alcoolisées aux mineurs est, quant à elle, interdite sous peine de sanctions pénales, selon l'article 99.
Dans la section consacrée au tabagisme du même chapitre, il est interdit de fumer dans les lieux affectés à un usage collectif, sauf dans les emplacements spécialement réservés aux fumeurs.
Les fabricants et les importateurs de produits du tabac sont sommés d'informer les autorités nationales compétentes de la composition des produits, selon le projet de loi qui considère comme produits du tabac, tout produit destiné à être fumé, prisé, chiqué ou mâché.
Ledit projet de loi interdit, dans l'article 87, "toute forme de promotion, de parrainage et de publicité en faveur des produits du tabac". Pour les paquets de cigarettes, outre l'avertissement général portant la mention "La consommation du tabac est nocive pour la santé", un avertissement spécifique, des dessins ou des pictogrammes émanant de l'autorité sanitaire, "doivent figurer sur l'autre grande surface du paquet", selon l'article 88.
Dans la section consacrée à l'alcoolisme et toxicomanie, il est interdit aussi la publicité pour les boissons alcoolisées et leur consommation ainsi que pour tout autre substance nuisible à la santé.
Il est précisé, dans l'article 96, que "l'Etat met en place un programme national de prévention de l'alcoolisme et de la toxicomanie". La prévention est assurée par "l'information, l'éducation sanitaire et la communication et par tout autre moyen approprié".
La carte sanitaire définie
Le projet de la loi relative à la santé définit la carte sanitaire comme étant le schéma directeur de la santé qui fixe les normes de couverture sanitaire et détermine les moyens à mobiliser au niveau national et régional.
Dans le souci d'assurer une répartition équitable des soins de santé, la carte sanitaire "tient compte du bassin de population, des caractéristiques épidémiologiques, sanitaires, géographiques, démographiques et socio-économiques", et vise, aussi, à "assurer l'accès aux soins en tout point du territoire national et améliorer les offres", précise le projet de loi.
L'objet de la carte sanitaire tel que présenté dans ledit projet de loi est de "prévoir les évolutions nécessaires, en vue d'adapter l'offre de soins, satisfaire de manière optimale les besoins de santé, définir l'organisation du système de soins et de préciser les conditions de mise en réseau des établissements de santé".
Evaluée et révisée, périodiquement, tous les trois mois, la carte sanitaire "détermine l'implantation, la nature, l'importance des installations sanitaires, y compris les équipements lourds, ainsi que les activités de soins nécessaires pour répondre aux besoins de la population" et "fixe, également, les limites des régions ainsi que les réseaux de prise en charge de problèmes particuliers de santé", est-il noté dans le projet de loi.
Le schéma d'organisation sanitaire vise, selon le même document, à "susciter les adaptations et les complémentarités de l'offre de soins, ainsi que les coopérations, notamment, entre les établissements et structures de santé.
Le service civil des praticiens médicaux proposé à 3 ans sans astreinte aux zones
L'avant projet de la loi relative à la santé fixe la durée d'exercice du service civil des praticiens médicaux à 3 ans minimum sans les astreindre aux zones, comme le stipule l'article 18 de la loi relative au service civil de l'année 1984.
"Les dispositions de l'article 18 de la loi 84-10 du 11 février 1984 relative au service civil sont abrogées", est-il précisé dans l'article 292 du projet de la loi relative à la santé qui souligne que "les praticiens spécialistes sont recrutés par les établissements publics de santé".
Les postes budgétaires sont "ouverts dans les établissements publics qui procèdent à leur recrutement conformément à la réglementation en vigueur. Les praticiens médicaux sont astreints à une durée d'exercice de 3 ans avant de présenter toute demande de démission ou mutation", selon le même article inscrit dans le chapitre V sur les dispositions relatives au recrutement des praticiens spécialistes.
L'article 18 de la loi 84-10 du 11 février 1984 relative au service civil stipule que "la durée effective du service civil peut être, par équivalence, modulée selon les zones, secteurs d'activité, unités économiques, projets de développement ainsi que selon les qualifications jugées prioritaires dans le cadre des plans de développement, sans qu'elle soit inférieure à un (1) an".
"La liste des zones, secteurs d'activité, unités économiques, des projets de développement ainsi que des qualifications jugées prioritaire, de même que les coefficients qui leurs sont respectivement appliqués, sont fixés périodiquement par voie réglementaire", selon la loi de 1984.
La même loi définit le service civil comme "la période légale de travail effectuée par les assujettis auprès d'une administration, d'un organisme ou d'une entreprise publique (...)" et "la contribution des assujettis au développement économique, social et culturel du pays".
Le service civil contribue aussi, selon la loi de 1984, à "la réalisation de la répartition des potentialités humaines qualifiées dans le cadre de la stratégie nationale de développement, en fonction des besoins prioritaires au plan sectoriel et régional".
Assistance médicale à la procréation: recours exclusif aux spermatozoïdes et à l'ovule du couple infertile
Dans l'assistance médicale à la procréation, il ne doit être recouru qu'aux spermatozoïdes de l'époux et à l'ovule de l'épouse à l'exclusion de toute autre personne, suggère le nouveau projet de la loi relative à la santé.
Ledit projet, dont l'APS a reçu une copie, propose également, dans ses dispositions relatives à l'assistance médicale à la procréation, d'interdire le don, le prêt, la vente et toutes autres formes de transactions de spermatozoïdes, d'ovocytes, même entre coépouses, d'embryons surnuméraires ou non à une mère porteuse ou une autre femme, soeur ou mère ou fille, ainsi que le cytoplasme.
Le texte en question, définit l'assistance médicale à la procréation comme "une procréation destinée exclusivement à répondre à la demande exprimée par un homme et une femme en âge de procréer, vivants, formant un couple légalement marié, souffrant d'infertilité avérée médicalement et consentant au transfert ou à l'implantation artificielle".
Par ailleurs, l'article 389 interdit "toute reproduction d'organismes vivants génétiquement identiques, concernant l'être humain et toute sélection de texte".
Un comité national de bioéthique pour la prise en charge des questions morales
L'avant projet de loi sur la santé propose la création d'un comité national de bioéthique pour la prise en charge des questions morales pouvant survenir lors de la pratique de la profession. L'article 351 de l'avant projet propose la création d'un comité national de bioéthique, "chargé de donner des avis et des recommandations sur les problèmes moraux soulevés par la pratique professionnelle, la recherche scientifique et l'application des technologies dans les domaines de la biologie, de la médecine et de la santé, ayant pour objet l'être humain dans sa double dimension individuelle et sociale".
Le texte propose que cette instance soit créée auprès du ministre chargé de la santé, et que sa composition, organisation et fonctionnement soient fixés par voie règlementaire.
La bioéthique est définie dans l'avant projet comme étant "l'ensemble des mesures et activités liées aux don et au prélèvement d'organes et tissus, du sang humain et de ses dérivés, à l'assistance médicale, à la procréation et à la recherche biomédicale".
Par ailleurs, le texte suggère la création de conseils nationaux, régionaux et locaux de déontologie médicale, de médecins, de chirurgiens dentistes et de pharmaciens.
Ces instances, composées exclusivement de médecins, de chirurgiens dentistes ou de pharmaciens, élus par leurs pairs, créent un organe de coordination et fixent leurs règlements intérieurs.
Les conseils nationaux, régionaux et locaux de déontologie, sont investis chacun en ce qui le concerne, du pouvoir de sanction, et se prononcent sur les violations des règles de déontologie médicale.
Ils peuvent être saisis par le ministre chargé de la santé, par les chefs d'établissements de santé publics et privés et par tout usager et/ou leurs représentants habilités.
Le prélèvement d'organes humains soumis au consentement du donneur
Le prélèvement d'organes humains ne peut être pratiqué sans le consentement préalable, exprès, libre et éclairé du donneur, stipule l'avant projet de loi sur la santé dans son chapitre sur les dispositions relatives aux organes et aux tissus.
"Sont régis par les dispositions de la présente loi, le sang humain et ses dérivés, les organes dont la moelle osseuse, les tissus et tout autre produit entrant dans son objet", li-t-on dans les articles 365 et 366 de l'avant projet de loi.
Le texte précise que l'information du public en faveur d'un don d'éléments et produits du corps humain est assurée par le ministère chargé de la santé, ajoutant que la publicité en faveur d'un don d'élément ou produit du corps humain au profit d'une personne déterminée ou bien d'un établissement ou organisme déterminé est interdite.
L'article 368 note que le prélèvement d'éléments du corps humain et la collecte de ses produits en vue d'un don ne doit donner lieu à aucun paiement de quelque nature que ce soit.
L'avant projet de loi interdit de dévoiler l'identité du donneur au receveur, et l'identité du receveur au donneur ainsi que de divulguer les informations permettant d'identifier à la fois, le donneur d'un élément ou produit du corps humain et le receveur de celui-ci.
Toutefois, cette interdiction peut être levée en cas de nécessité thérapeutiques et dans les cas où le donneur et le receveur sont apparentés. Le prélèvement d'organes, en vue d'un don, sur une personne vivante mineure ou incapable est interdit.
Le prélèvement d'organes sur une personne décédée ne peut s'effectuer sans le consentement authentifié et obligatoire de la personne concernée de son vivant.
Aucune rémunération à l'acte ne peut être perçue par les praticiens effectuant des prélèvements et les praticiens effectuant des transplantions d'organes et tissus au titre de ces activités.