L’historien Ali Guenoun, enseignant à l’Université Paris 1, s’est interrogé lundi à Oran sur la rareté et le peu d’intérêt accordé par les chercheurs à la crise identitaire qui a surgi au sein du PPA/MTLD (Parti du peuple algérien/Mouvement pour le triomphe des libertés démocratiques) en 1949.
"Cette crise a été très peu étudiée, aucun auteur ne s’y est consacré. Elle a été considérée comme une simple étape dans le mouvement national. Pourquoi, cet épisode qui a touché des centaines de militants et qui a duré, en 1949, plusieurs mois n’a pas suscité de recherches ? ", s’est interrogé Ali Guenoun, qui a animé, au CRASC d’Oran, une conférence intitulée "Un élément conflictuel au sein du PPA/MTLD: la question identitaire".
"Le sujet était tabou et il a été refoulé par les acteurs eux-mêmes, notamment par les opposants et les dirigeants du parti", a encore souligné l’historien, estimant qu’il s’agit là "d’une conflictualité interne au nationalisme radical algérien".
Le conférencier est remonté jusqu’à la fin du deuxième conflit mondial qui a favorisé l’apparition de nouvelles formes d’organisation au sein du PPA.
Pour lui, une nouvelle génération a émergé porteuse de nouveaux questionnements sur le fonctionnement du parti, le projet insurrectionnel mais aussi sur la définition de la nation algérienne.
"C’était une génération d’opposants qui ont introduit ces paramètres importants porteurs de facteurs de clivage qui vont donner naissance à des conflits d’ordre politique au sein du parti et qui vont avoir pour conséquence de se muer en un antagonisme +identitaire+ fondé sur l’appropriation polémique et la manipulation politique, des catégories classificatoire telles que langue, ethnie, région et nation", a-t-il souligné, rappelant qu’"une crise profonde a secoué le parti dès 1949".
Pour Ali Guenoun, ces opposants ont été qualifiés de "berbéristes", alors qu’ils n’étaient que des opposants à la direction du parti.
Le conférencier a souligné, par ailleurs, que le colonialiste français entendait utiliser la "question berbère" comme un élément de division entre les Algériens, alors que ces opposants eux-mêmes, qualifiés de "berbéristes" ne revendiquaient ni plus ni moins que l’indépendance de l’Algérie et recherchaient les meilleurs moyens d’y aboutir, notamment la lutte armée.
Dans sa présentation du thème de la conférence, Amar Mohand-Amer, historien et chercheur au CRASC, a indiqué que "c’est la première fois qu’un travail académique est effectué sur un segment important du mouvement national algérien, notamment sur la question berbère", soulignant que la thèse de ce chercheur sera bientôt publiée.
Ali Guenoun a soutenu une thèse de Doctorat, en septembre 2015 à l’Université Paris 1 (Sorbonne-Panthéon) consacré à cette question, rappelle-t-on. APS