Azzedine Belkacem Nacer : « le développement local souffre du manque de prospection et d’évaluation à péréquation horizontale »

« Les zones d’ombre sont l’apanage de la mauvaise gouvernance locale et ce n’était nullement un problème de finances au vu de la gamme des plans communaux, de wilaya, sectoriel et national de développement (PCD, PWD, PSD et PND) », indique Azzedine Belkacem, Professeur des universités, consultant et ex-haut fonctionnaire                   

S’exprimant, ce jeudi, dans l’émission L’Invité de la rédaction de la Chaine 3 de la Radio Algérienne, il affirme qu’« Il ne pourrait y avoir de développement équitable de ces zones sans l’existence de prospective nationale et coordonnée ».

Abordant la thématique de développement de zones d’ombre, M. Azzedine Belkacem insiste sur le fait qu’au-delà de la sémantique, il y a un grand écart frustrant entre régions, même urbaines, par rapport à la réalité concrète faite d’inégalité dans la gestion locale.

« Ce sont des zones qui concernent dans un sens les régions attardées, ça concerne tout le cœur du territoire qui a accusé un retard terrible de développement, et qui sont devenues enclavées du fait de la mauvaise gouvernance », explique-t-il.

« Quand il n’y a pas de prospection, il ne peut y avoir de développement équitable entre régions », tranchera l’Invité, faisant sienne un proverbe texan qui stipule : « Il n’y a pire pauvre que celui qui était riche avant »

L’orateur ne mâche pas ses mots pour dire : « Le développement des zones d’ombre a besoin d’un sérieux accompagnement et non une compagne temporelle et spatiale » et de préciser que « Le développement est un concept d’atténuation des disparités existantes entre des zones retardataires, en termes de développement, par rapport à d’autres régions qu’on dit développées ».

Défaillance de gestion locale

Revenant au concept de la prospective, l’orateur explique que « Ce n’est pas un luxe » mais, c’est un concept d’« Apporter un état escompté et judicieux et de le mettre en dehors de la coupe de l’exécutif » . « En clair, la soumettre à une structure pérenne qui survit aux gouvernants pour tracer justement un objectif à long terme », propose-t-il.

C’est beau, dit-il, d’annoncer des chiffres courageux de l’état de fait des zones d’ombre comme les 8000 localités coupées des réseaux de l’énergie, selon le ministre de l’Energie ou celui de l’Intérieur, qui identifie 15.000 zones d’ombre (dont 300 à Alger même), habitées par huit (8) millions âmes pour lesquelles on y compte 2000 projets c’est qu’il y a quelque chose qui ne va pas.

« Ceci suggère qu’au-delà des chiffres, il ne faut pas camper sur des programmes de moyens termes, mais aller dans le long terme », souligne-t-il et de s’interroger « Qu’a-t-on préparé pour 2030 comme horizon, par exemple, sur un ensemble d’actions qui concernent d’abord l’ensemble du territoire (le SNAD) ? », exigeant d’établir « Une évaluation exhaustive qui mérite d’être menée ».

Ce n’est nullement une question de financement

Evoquant le fonds qui y est dédié, il dit ne pas adhérer à l’idée de fonds spécial dédié aux zones d’ombre, arguant le nombre de fonds similaires existant aux mêmes objectifs (allusion faite aux fonds du développement du Sud et les fonds consacrés au développement des hauts plateaux, développement rural, agricole, etc… ndlr), et de relever « Sauf exception majeure, combien de fonds ont montré leurs limites. »

Il faut l’inscrire dans un large programme pour atteindre les objectifs opportuns, propose l’expert Azzedine Belkacem.

La coordination des instances est la clé du développement national

"Le développement local n’est, selon l’orateur, pas seulement une affaire de classement par ratio mais, il repose sur un nombre de facteurs : la démographie, la dimension socioéconomique, l’aspect relatif à la finance locale et la fiscalité en l’occurrence puis la gouvernance locale" rappelle-t-il.

Schématiquement, dit-il, il faut commencer par considérer les outils qui manquent, tels les plans PCD, PSD, PCS, donc tout le monde est concerné par le développement local, soulignant que tout le territoire national est le réceptacle de toutes les actions de développement gouvernementales, mais la problématique est une question de visions coordonnées et de mettre les instruments à la place qu’il faut.

Chiffres à l’appui, l’Invité de la Chaîne 3, rappellera l’expérience malheureuse du fonds du plan communal de développement (PCD) expliquant qu’en 10 ans, depuis 2010, il était de 60 milliards DA puis augmenté à 100 milliards DA avant de redescendre à 40 milliards". "il y a là encore quelque chose qui ne va pas", fera-t-il remarquer.

Et d'ajouter qu’en 20 ans (depuis 1999, ndlr), on a eu à faire à une estimation globale de PCD avoisinant 1400 milliards DA, mais, insiste-t-il, « Ça serait plutôt intéressant de savoir comment les choses s’étaient passées ». « Une évaluation de comment vont les programmes en cours est plus que nécessaire ? », martèle-t-il.

« Sur la dimension finances (budget de wilayas et budgets communaux et le budget de l’Etat), on ne revient pas à la normalité des choses tant qu’on n’a pas assaini la fonctionnalité et la gestion des affaires courantes », déplore-t-il.

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