Réduction de ressources financières, Inflation galopante, perte d’emplois, des entreprises en difficultés, l’embrasement social, plus moins larvé avec des grèves tournantes et cycliques sont autant de frémissements annonciateurs de situations de crises imminentes, alerte M. Yacine Ould Moussa.
« Il faut agir vite avant que le temps ne nous dépassent », avertit l’économiste Ould Moussa, indiquant que « les difficultés de notre économie sont structurelles et non conjoncturelles ».
L’invité de la rédaction de la chaine 3, de la Radio Algérienne tire la sonnette d’alarme et conseille de « lancer rapidement de véritables et profondes réformes », nuançant qu’« il y a une différence entre l’urgence et la durée ».
Et d’expliquer « dans l’urgence c’est les mesures palliatives et pour cela il faut avoir des ressources, de l’organisation de l’économie, faire l’inventaire, avoir les hommes », ajoutant qu’il faut aussi des objectifs pertinents, une organisation performante et des hommes engagés et compétents qui sont prêts à s’inscrire dans la durée.
Selon l’intervenant cet inventaire permet de voir les capacités et les attentes tout en sachant que la stabilité politique commence par la stabilité sociale. Car au-delà des revendications politiques on peut trouver des solutions mais les revendications sociales c’est des réponses économiques. « Et pour répondre à ces revendications, les solutions palliatives n’ont plus cours ».
«Les questions sociales ne peuvent être résolues sans création de richesse et de l’emploi », relève-t-il montrant qu’on paye ces années d’ineptie économique.
On paye, explique-t-il, « les années blanches » où l’on a rien changé depuis des années d’un iota le modèle de croissance, du modèle de développement, de la façon de créer de la valeur, de la façon de créer de la richesse, de la façon de collecter de l’épargne, de la façon d’investir, des choix stratégiques importants qui sont générateurs de progrès, d’intégration économique, de reconquête du marché intérieur.
Et de regretter que l’on s’attarde sur la création des conditions idoines de l’économie de la connaissance qui est une économie extrêmement complexe et sensible aux variations aux inepties de l’écosystème.
Pour rattraper cet immense retard sur l’agenda économique à mettre en route il constate qu’« il ne faut pas restaurer que le ministère de plan, comme un outil efficace, mais il faut aussi restaurer la prévision : le calcul économique, la planification et la capacité d’évaluer nos besoins sur plusieurs années tout en évaluant nos moyens ».
« On n’utilise pas des moyens modernes pour une économie archaïque », fait-il remarquer appelant à faire avec la politique de ses moyens.
« C’est la 3ème fois qu’on n’a eu le choc mais on ne retient pas la leçon », se désole l’économiste. On paye aujourd’hui, dit-il, la facture de « la cécité économique » occasionnée par la politique de la rente et la disponibilité de la manne de ressources financières dépendant du prix du baril de pétrole.
Se disant rassurant, M. Ould Moussa temporise par «même si nos ressources sont actuellement maigres, il est toujours possible de faire relancer notre économie. Il faut juste faire des réformes, mais des réformes basées sur le diagnostic de la réalité. « Il faut optimiser nos ressources par le principe de l’efficience », fait-il savoir.
Les ressources, dit-il, sont évaluées par rapport aux objectifs et non pas évaluées ex nihilo dans l’absolu précisant qu’« il faut savoir adapter nos compétences à notre économie ». La compétence, explique-t-il, crée la richesse oui, mais dans une économie rentière, la compétence était chez nous subversive, soulignant que « souvent ceux qui étaient compétents étaient contre les politiques de la rente ».
Ça ne peut pas durer, il faut prendre le temps par des visions à court terme, suggère l’invité de la chaine 3 rappelant, non sans regret qu’ « on a longtemps gérer notre économie avec deux lois de finances (la loi de finances et la loi de finance complémentaire) ». « Il faut cesser ce jeu dont les résultats montrent qu’il n’est pas efficace et encore moins efficient », martèle-t-il.
L’impératif d’un large consensus
« On doit s’inscrire dans la durée et on doit ouvrir un large débat à l’objet d’un consensus autour du diagnostic », conseilla-t-il appuyant que « pour une relance bien pensée il faut passer par l’établissement d’un inventaire qui, de plus n’a jamais été fait en dépit des chocs subis depuis celui en 1986.
« Pour quelle économie ? Quel modèle de société ? Quelles sont les principales orientations qui tiennent compte de nos réalités ? S’interroge l’analyste, regrettant « le temps perdu quand on avait de bonnes recettes ».
« Quelle modèle de société voulons-nous ?», se demanda le professeur et de répondre par « c’est une question qui engage toute la société algérienne et non une question de quelques policymakers (faiseurs de la politique, ndlr) », faisant sienne l’adage « ce qui est urgent ne l’est pas, le plus important prend du temps ».