Le réseau social Facebook, mis en cause dans les révélations sur l'utilisation des données confidentielles de millions d'usagers à leur insu, est confronté à une large campagne de désabonnements «Quittez Facebook» (delete facebook») et à la chute de son titre en Bourse.
Son patron-fondateur Mark Zuckerberg a reconnu mercredi des «erreurs» et promis des améliorations quant à la protection des données personnelles, en particulier pour les applications tierces auxquelles on se connecte via son compte Facebook.
C'est à travers une application de ce type que des données confidentielles de dizaines de millions de personnes ont fini aux mains de la firme britannique Cambridge Analytica (CA) à leur insu.
Cambridge Analytica est accusée d'avoir récupéré à leur insu les données de 50 millions d'utilisateurs pour élaborer un logiciel permettant de prédire et d'influencer le vote des électeurs, afin de peser dans la campagne présidentielle de Donald Trump en 2016.
«Quand les données quittaient les serveurs de Facebook, ils perdaient la connaissance et le contrôle de ce qui était fait avec ces données», a affirmé un ancien responsable d'exploitation de Facebook, Sandy Parakilas, devant une commission parlementaire britannique. Selon lui: «Facebook était au courant de ce qui se passait et n'a prévenu personne».
M. Zuckerberg s'est dit «responsable de ce qui se passe» sur le réseau, s'exprimant sur sa page personnelle, aux plus de 2 milliards d'utilisateurs du réseau social mais aussi aux actionnaires qui encaissent de lourdes pertes depuis plusieurs jours. Depuis lundi, Facebook a perdu des dizaines de milliards de dollars de valorisation boursière, la chute s'interrompant toutefois mercredi.
La colère contre Facebook était toutefois manifeste. Brian Acton, cofondateur de l'application de messagerie WhatsApp rachetée à prix d'or en 2014 par Facebook, a joint sa voix à celle de nombreux internautes et appelé à quitter le réseau social.
«Il est temps. îdeletefacebook», a écrit sur son compte Twitter M. Acton, qui travaille désormais pour Signal, une application de messagerie rivale de WhatsApp. «Effacer et oublier. Il est temps de se soucier de la vie privée», a-t-il ajouté.
Plusieurs sites internet proposent des astuces pour se désabonner, avertissant toutefois que le processus de désabonnement est beaucoup plus complexe qu'il n'y paraît. Facebook propose aux utilisateurs une option «désactiver» son compte, qui permet de suspendre temporairement ce dernier.
Le journal de l'utilisateur ne sera plus disponible mais certaines informations comme les messages envoyés resteront visibles.
Quant aux utilisateurs qui optent pour «supprimer», ils ne pourront plus réactiver leur compte. Les messages envoyés à des amis resteront accessibles. Les copies de certains éléments tels les historiques de connexion restent également dans la base de données de Facebook.
La suppression définitive du compte peut prendre jusqu'à 90 jours mais, durant cet intervalle, les informations ne sont plus accessibles. Si l'utilisateur se reconnecte, la demande de suppression est annulée, prévient Facebook.
Les candidats au désabonnement se servant de Facebook pour se connecter sur d'autres applications ou d'autres sites peuvent par ailleurs connaître des problèmes au moment de s'identifier. Ils devront également penser à leur présence sur d'autres applications rattachées au réseau social comme Instagram, WhatsApp et Messenger.
Pour Roger McNamee, un des investisseurs les plus réputés de la Silicon Valley et un des premiers actionnaires de Facebook, la crise actuelle a fait une victime importante: la confiance placée dans le réseau social par ses utilisateurs. Or, celle-ci est la clé du succès de la société.
«Le problème c'est le mépris insensé pour les droits des utilisateurs à la vie privée et une indifférence vis-à-vis du respect des données qu'ils ont confiées à Facebook», a déploré M. McNamee sur la radio américaine NPR.
Des utilisateurs et des petits porteurs n'ont pas attendu et ont décidé de porter l'affaire devant des tribunaux pour demander à être dédommagés. Des cabinets d'avocats américains ont annoncé mercredi avoir déposé des plaintes et recours en nom collectif («class action») au nom de citoyens et d'actionnaires. Celles-ci doivent toutefois encore être acceptées par un juge pour être instruites.
Quant à Mark Zuckerberg, il a été prié de venir s'expliquer devant des députés britanniques et a également été invité à s'exprimer devant le Parlement européen qui va «enquêter pleinement» sur cette affaire. APS