La révision de l'actuelle politique des subventions des produits de base et l'encouragement de la productivité, a été vivement recommandée par les participants à la Table ronde organisée dimanche par le Conseil national économique et social (CNES) autour de l’émergence de l’économie nationale.
Ils ont considéré « insoutenable » que l’Algérie continue à subventionner, de façon indirecte le gasoil et l’électricité, ou de façon directe la baguette de pain et le sachet de lait par exemple, en mettant à égalité les pauvres et les nantis et les producteurs et des importateurs.
« Le régime de subventions devrait être scrupuleusement adapté à la stratégie économique globale. On ne peut continuer à soutenir toutes les activités de la même manière », a estimé Youcef Benabdallah, chercheur au Centre de recherche en Economie Appliquée pour le Développement).
Avec des subventions directes (budgétisées) représentant presque un quart du budget de l’Etat et 13% du PIB national, un taux global atteindrait 30% du PIB, selon les données communiquées par les experts.
« Les riches doivent accepter de payer les prix réels », a martelé cet intervenant, proposant d’instituer un système de subventions discriminant » favorisant les producteurs de richesse, sur la base de la valeur ajoutée, du taux d’exportation et de celui de l’utilisation de la technologie.
M. Benabdellah et d’autres chercheurs ont appelé l’exécutif à accorder plus d’attention à la microéconomie et à la productivité et ne pas continuer à se gargariser des chiffres d’une macroéconomie « temporairement euphorisante ».
« L’analyse économique est tronquée en Algérie car elle est « pétrolisée », la macroéconomie qui est là pour couvrir tous les déficits et la microéconomie se retrouve inhibée, voire exonérée de la productivité » ont-il regretté.
Le chercheur au Cread et professeur à l’Université d’Oran, Rafik Bouklia Hassene a, de son côté, mis l’accent sur la nécessaire diversification économique en rappelant que la part de l’Industrie dans le PIB Algérien ne dépassait pas les 5%.
La diversification économique, quoique incontournable, est loin d’être une tâche facile pour les pays producteurs de pétrole ou dépendant de la rente en général, reconnaît-il.
« Ce sont des transformations structurelles très dures qu’il faut opérer en Algérie pour arriver à cette diversification », indiqué-t-il.
M. Bouklia préconise au Gouvernement des études approfondies sur l’impact des mesures économiques engagées sur la production.
« On nous dit que les licences d’importations ou un taux de change en baisse, par exemple, profiteront à la production, mais on ne sait pas vraiment s’il s’agira de freins ou de moteurs pour l’industrie», craint-il.
Pour Ali Boukrami, économiste et ex-ministre, la croissance hors hydrocarbures dont parle le Gouvernement n’est qu’une « illusion».
L’ensemble des exportations Algériennes proviennent des hydrocarbures car celles réalisées hors hydrocarbures sont en réalité des dérivés de ces derniers alors que la fiscalité dite ordinaire est tirée des impôts sur le revenu et sur les importations et c’est surtout l’Etat qui est en train de payer l’impôt», a-t-il argué.
Les participants a la rencontre étaient nombreux à déplorer la difficulté, voire l’impossibilité, d’accéder à l’information économique et ont sollicité pour cela le Gouvernement à élaborer un système d’information fiable qui puisse servir de « clignotants » pour une prise décision rationnelle.
« Si l’on prend l’indice des prix à la consommation par exemple, il est indexé sur un coefficient de pondération datant de 2001, comment voulez-vous que les chiffres sur l’inflation soient fiables avec un tel retard », s’est interrogé M. Hammouda, un autre chercheur au Cread.