Les pays de la région Mena devraient s’efforcer de mener des réformes économiques "bien conçues et appliquées de façon équitable" pour assurer la croissance et l’emploi, a indiqué Jihad Azour, directeur du département Moyen-Orient et Asie centrale du FMI.
Dans une contribution publiée sur le blog du FMI dans le sillage des accusations adressées à cette institution financière internationale de vouloir imposer l’austérité à la Tunisie, Azour relève qu’il est " regrettable que le processus de réforme économique en cours fasse marche arrière ".
Djihad Azour soutient que "la montée des tensions sociales et des manifestations dans plusieurs pays du Moyen-Orient et d’Afrique du Nord montrent clairement que le désir de prospérité, d’équité et d’avenir des habitants de la région reste insatisfait".
"Ceci nous ramène à la nécessité des réformes, des réformes bien conçues, bien échelonnées, et appliquées de façon équitable à toute la population", explique-t-il. Les programmes menés dans ce sens devraient aussi veiller à l’équilibre social et à tenir la promesse d’une vie meilleure pour tous, et plus particulièrement pour les personnes pauvres et vulnérables".
"C’est le défi que doit relever aujourd’hui cette région" qui souffre depuis des décennies d’un modèle d’assistanat où le secteur public est le plus grand pourvoyeur d’emplois", dira-t-il à ce propos.
Actuellement, la plupart des pays n’ont pas d’autre choix que d’équilibrer leurs budgets car, selon lui, il n’est pas tenable d’accumuler des dettes publiques pour financer des dépenses qui se sont trop souvent révélées improductives.
"Le remboursement de ces dettes se fait au détriment de dépenses vitales dans les domaines de la santé et de l’éducation, et ce sont les générations futures qui en paieront le prix", prévient ce responsable.
Tenir compte de la situation de chaque pays
Pour être efficaces, les programmes de réformes doivent être adaptés aux circonstances propres à chaque pays, précise-t-il.
"Dans les pays où l’Etat dispose de marges de manœuvre importantes, comme en Algérie ou dans le Golfe, le FMI a suggéré de réduire les déficits à une cadence modérée", relève Azour.
"Dans ceux où la dette publique est déjà élevée et augmente encore, comme en Egypte ou en Tunisie, le FMI a fourni des financements qui permettront un ajustement budgétaire plus progressif que ce qui aurait été possible autrement, et à un taux d’intérêt plus bas".
"Nous nous efforçons également d’être attentifs aux circonstances sociales et politiques, comme en Tunisie, où nous avons adouci plusieurs fois l’objectif en matière de déficit budgétaire, malgré les conséquences pour la dette et l’inflation", explique Azour dont l’institution a nié jeudi dernier avoir imposé un programme d'austérité à la Tunisie qui aurait été à l'origine de la montée des tensions sociales dans ce pays maghrébin.
Aussi, les gouvernements devraient veiller à assurer "une répartition équitable de l’impôt sur toute la population3, suggère Azour même s’il reconnaît que "la politique fiscale et budgétaire des Etats constitue peut-être bien le sujet le plus sensible".
Il faut donc "redoubler d’efforts pour lutter contre la fraude fiscale, élargir l’assiette de l’impôt" et veiller également de plus en plus à ce que les personnes les plus vulnérables soient préservées des augmentations d’impôts et des réductions des dépenses, recommande le chef du département Mena et Asie centrale.
En parallèle, il préconise la réduction des subventions à l’énergie, très coûteuses et profitant aux riches? et le maintien des subventions alimentaires, par exemple pour l’achat de pain en Jordanie et en Tunisie.
"Les défis à relever dans la région demeurent considérables", constate-t-il, mais estime pour autant que les pays ont bien progressé depuis le "printemps arabe".
Globalement, la région a maintenu la stabilité macroéconomique, en dépit de circonstances très difficiles, la croissance est en hausse, l’inflation se stabilise, et dans la plupart des pays, l’endettement ralentit.
Plus encourageant encore, la population de la région, jeune et talentueuse, semble de plus en plus désireuse de prendre son avenir en mains. Portée par un système éducatif adéquat et de véritables perspectives d’emploi, cette nouvelle génération pourrait alimenter une croissance économique sans précédent, prévoit ce responsable.
"Autre bon signe, les dirigeants de la région donnent de plus en plus la priorité à la croissance et à l’emploi", souligne Azour.