La pièce de théâtre «Achbah wa Tawila» (les clones et la table), comédie noire montée dans le registre du théâtre réaliste qui dénonce l’immobilisme des pays arabes où la liberté d’expression est «loin d’être consacrée encore», a été présentée mercredi soir à Alger, devant un public relativement nombreux.
D’une durée de 60 mn, le spectacle, présenté au Théâtre national Mahieddine-Bachtarzi (Tna) dans le cadre des 8e Journées du théâtre dans le sud par l’association «Ennibras» des Arts dramatiques de Djelfa, est un réquisitoire qui invite à la réflexion, contre la volonté de «freiner le progrès de la pensée humaine», caractérisant les «pays arabes».
Mis en scène par Khaled Ouanaouki sur un texte du dramaturge jordanien Atif Ali El Feraya (1964-2013), «Achbah wa Tawila» dresse un constat sur la réalité alarmante dans les pays arabes où les sociétés, animée par le même intelligent collectif, façonné de manière à occulter le questionnement, se retrouvent sclérosées et vouées au conformisme.
Quatre personnages ont servi le spectacle, «Mechroukh», rôle principal incarnant l’ambition démesurée au changement, « X» et «Y», quelconques présentant l’état d’esprit stagnant, similaire au «milliard» (nombre volontairement exagéré) de citoyens arabes et le professeur refusant tout questionnement, se contentant de cultiver la disposition des esprits à la pensée unique.
Les comédiens, Kamel Ouanaouki, dans le rôle de «Mechroukh», Khaled Ben
Lahrèche, Mohamed Amor et Kamel Djelfaoui ont brillamment portés leurs personnages et servi la densité et la puissance du texte qui, de l’avis d’un connaisseur, a «renseigné le public sur la réalité des peuples arabes».
Constatant le danger que représentait «Mechroukh», conscient de sa condition de citoyen réduit au silence et à l’immobilisme, le professeur ordonnera de lui faire subir une intervention chirurgicale sur son cerveau, afin de «formater» son esprit et le rendre semblable aux autres.
Dans un jeu plaisant, au rythme soutenu, une scénographie fonctionnelle minimaliste mais efficace, œuvre de Khaled Ben Lahrèche -par ailleurs architecte de formation- un éclairage concluant et un montage musical judicieux qui a facilité les transitions, réalisé par Ahmed Akhderi, le spectacle a dessiné la caricature d’une Nation arabe «en détresse absolue», dira Khaled Ouanaouki.
Basé sur le «théâtre du questionnement», le spectacle -bien accueilli par le public et l’ensemble des praticiens et critiques du 4e art présents- tire sa force de la pédagogie et la méthode comparative avec l’occident utilisées, qui, selon le metteur en scène, faisant «allusion aux juifs», ne compte que 15 millions d’individus, pourtant « détenteurs du sort de la planète entière».
Ouvertes le 24 mars dernier, les 8e Journées du Théâtre dans le sud prendront fin jeudi au Tna, avec le spectacle de clôture «Ahjiya Electrouniya», qui sera animé par la troupe de théâtre «Ritej el Masrah» du Soudan, invité d’honneur de ces journées. APS