Petites et grandes histoires de la Coupe du monde

 Insolites, émouvantes, belles, cruelles,  effrayantes. La Coupe du monde regorge d'anecdotes en tous genres qui font sa  légende depuis 84 ans et 19 éditions. Coup de projecteur sur huit histoires en  attendant que d'autres s'écrivent au Brésil.     

Coups de têtes

Attaquant vedette de la Serbie, Rajko Mitic se blesse à la tête juste avant  un match clé contre le Brésil dans le groupe 1 au Mondial-1950, en heurtant une  poutrelle dans les coursives d'un Maracana inachevé. Le temps de recouvrer ses  esprits, il entre sur le terrain après 5 minutes seulement. Mais Ademir a déjà  marqué pour la Seleçao, qui l'emportera finalement 2 à 0.

Autre coup de tête,  autrement plus célèbre cette fois, celui de Zinédine Zidane contre le torse de  Marco Matterazzi et qui lui valut d'être exclu en prolongation de la finale du  Mondial-2006, remportée par l'Italie aux tirs au but contre la France. L'image  du N.10 français passant devant le trophée, tête basse, sans un regard, en  quittant la pelouse du stade olympique de Berlin est restée dans les mémoires.

The sound of silence

Rio de Janeiro. Le dernier match du Mondial-1950 n'est pas une finale mais  doit tout de même désigner le vainqueur, le Brésil, archi-favori, ou l'Uruguay. 

Un nul suffit à la Seleçao pour être sacrée et le score est de 1-1 à la 79e  minute. L'instant choisi par Alcides Ghiggia, bien aidé par une erreur du  portier Auriverde, pour marquer le 2e but et offrir à la Celeste sa 2e coupe du  monde après 1930. "Seules trois personnes en ont fait taire 200.000 au Maracaña  sur un seul geste: Frank Sinatra, le Pape Jean-Paul II et moi", dira plus tard  Ghiggia. Quant à sa "victime", Barbosa, il déclara en 1993 payer "depuis 43 ans  pour un crime que je n'ai pas commis alors que de véritables assassins ne font  que 30 ans de prison". Décédé en 2000, il ne fut jamais pardonné.     

Des Bleus en vert et blanc

Déjà éliminée de la phase de groupes du Mondial-1978, la France joue son  dernier match contre la Hongrie. Avant la rencontre, l'arbitre s'aperçoit que  les deux équipes ont des maillots de même couleur. La délégation française  avait mal compris la recommandation de la Fifa imposant aux Bleus de jouer en  blanc. C'est finalement avec les maillots prêtés par l'équipe junior du CA  Kimberley (club local de Mar Del Plata), rayés verts et blancs, trop serrés,  avec des numéros ne correspondant pas à ceux de leurs shorts, que les Français  parvinrent à s'imposer (3-1).

Le miracle de Fritz Walter

Dix ans avant d'être le héros d'une Allemagne renaissante après sa victoire  en finale du Mondial-1954 aux dépens de la Hongrie de Puskas (3-2), Walter  était un prisonnier de guerre. Sur la route menant à un goulag, son convoi s'arrête dans une zone contrôlée par l'armée hongroise. Walter, qui assiste à  un match entre geôliers en attendant de repartir, renvoie vers le terrain le  ballon sorti, d'une demi-volée puissante. Impressionnés, les Hongrois  l'invitent à jouer.

C'est alors que l'un d'entre-eux le reconnaît, lui qui en  1942 avait inscrit un doublé contre les Magyars (5-3). Le soldat décide alors  de le sauver et le fait passer pour un Autrichien enrôlé de force dans la  Wehrmacht. Walter est finalement relâché par les Soviétiques. A la fin de sa  carrière, il aidera à son tour la Hongrie, avec un soutien financier et par le  biais de matches de charité après l'invasion soviétique de 1956.     

"Jaune attention, rouge stop"

Lors du quart de finale tendu entre l'Angleterre et l'Argentine en 1966,  l'arbitre M. Kreitlein veut renvoyer aux vestiaires le capitaine argentin  Rattin après une énième faute, mais le joueur refuse de quitter le terrain. Ce  sont finalement les forces de l'ordre qui se chargent d'expulser l'Argentin. La  Fifa réalise alors qu'il faut trouver un moyen de matérialiser l'ordre  d'exclusion. Ken Aston, un arbitre anglais qui assistait à ce match, trouva la  solution en voiture, inspiré par le passage à l'orange puis au rouge du feu  tricolore. L'orange deviendrait jaune pour dire "attention", le rouge pour dire  "stop". Les deux cartons firent leur apparition au Mondial-1970.

Et trois jaunes qui font un rouge

Mondial-2006, match de poule Croatie-Australie (2-2). Né à Canberra, le  Croate Josip Simunic commet trop de fautes. Une première lui vaut un carton  jaune à la 61e minute. A la 90e minute, il est à nouveau sanctionné d'un autre  carton jaune, qui doit faire rouge. Sauf que l'arbitre anglais Graham Poll  oublie de l'exclure. Mais Simunic trouve encore le moyen de faire une nouvelle  faute quatre minutes plus tard dans le temps additionnel, se voyant cette fois  bien exclu pour un... 3e avertissement.     

"Goal, goal, goal, goal..."

"La vie ne s'arrête pas là. Nous devons aller de l'avant. Peu importe la  difficulté. Nous n'avons que deux options: soit laisser la colère nous  paralyser et alors la violence continuera, soit on la surmonte et faisons de  notre mieux pour aider autrui. Ca a été l'expérience la plus incroyable de ma  vie. Nous nous reverrons bientôt car la vie ne s'arrête pas là." Ces mots ont  été écrits par Andres Escobar dans une tribune que lui accorda le journal  colombien El Tiempo, au lendemain de son but contre son camp face aux  Etats-Unis (1-2) qui a éliminé son pays du Mondial, le 22 juin 1994. Dix jours  plus tard, Escobar était abattu à Medellin de 12 balles dans la peau, ses assassins, criant "goal", à chaque balle tirée.     

La main, le pied et le crépuscule de Dieu

En deux éclairs, ce 22 juin 1986 à Mexico, Diego Maradona a incarné à lui  seul l'oeuvre de Dieu et la part du diable dans le foot. Cela a d'ailleurs  commencé avec ce geste (du) malin, cette main qui trompa Shilton, l'arbitre  mais pas le monde, et qu'il attribuera lui même plus tard à Dieu. Puis dans la  foulée il y eut ce but, le plus plus beau, le plus fou de toutes les Coupes du  monde, ce chef d'oeuvre touché par la grâce, comme une rédemption - ou pas - de  sa vilaine tricherie quatre minutes auparavant, et qui finit de terrasser l'Angleterre honnie en quart de finale (2-1). Diego deviendra définitivement  dieu aux yeux des Argentins après la victoire en finale contre l'Allemagne 

(3-2). Huit ans plus tard, le 25 juin 1994, Diego se brûle définitivement les  ailes avec une tricherie de trop: il est exclu du Mondial-1994 pour dopage à  l'éphédrine.