Espagne: six raisons pour un fiasco

Six années au sommet avant le retour sur terre: entre l'Euro-2008, le Mondial-2010 et l'Euro-2012, l'Espagne  a marqué durablement l'histoire du football avant de s'effondrer mercredi au  Mondial-2014, une élimination précoce qui peut s'expliquer par plusieurs  raisons:     

1. Une saison à rallonge

Les clubs espagnols ont dominé le football européen cette saison avec le  sacre du Real Madrid face à l'Atletico en finale de la Ligue des champions (4-1  a.p.) et le titre du FC Séville en Europa League.

Soit autant de matches intercalés en semaine, auxquels s'ajoute un  Championnat d'Espagne qui a été intense et indécis jusqu'à la dernière journée  mi-mai.

Et avec des confrontations en matches aller-retour en Coupe du Roi, le  calendrier a laissé très peu de place à la récupération pour 14 des 23  mondialistes qui évoluaient en Espagne.

2. Un manque de renouvellement

Le sélectionneur Vicente del Bosque a une qualité, la loyauté, qui s'est  retournée contre lui: en emmenant au Brésil 16 des champions du monde de 2010,  il n'a sans doute pas insufflé assez de sang neuf.

"Les yeux de certains joueurs, après avoir autant gagné, ne sont pas les  mêmes que lorsqu'ils ont commencé", admettait-il lui-même le mois dernier.

Mais sa logique de groupe, poussée jusqu'à l'extrême, a conduit à la  reconduction de joueurs comme Xavi (34 ans), Xabi Alonso (32 ans), Iker  Casillas (33 ans) ou Fernando Torres (30 ans), qui n'ont pas eu leur rendement  passé.

3. Un banc sans jokers

Corollaire du point précédent: le groupe espagnol, dépourvu de vraies  surprises, manquait d'éléments capables de déstabiliser l'adversaire et de  renverser une situation en rentrant en cours de match.

Ainsi, des remplaçants comme Santiago Cazorla ou Juan Mata présentent des  profils très proches de ceux des titulaires.

A l'inverse, un ailier explosif comme Jesus Navas (Manchester City) ou un  meneur de rechange comme Thiago Alcantara (Bayern Munich) auraient pu soulager  les titulaires dans les moments délicats mais des blessures avant le Mondial  les ont éloignés de la sélection.

4. Une préparation tronquée

Autre conséquence fâcheuse de la finale de Ligue des champions 100%  espagnole qui a eu lieu le 24 mai à Lisbonne, la Roja n'a disposé que de onze jours pour s'entraîner au grand complet, entre l'annonce de sa liste des 23 et son entrée en lice dans le Mondial le 13 juin.

Et Del Bosque n'a eu qu'un match amical, contre le Salvador, pour effectuer les nécessaires réglages, comme réussir la greffe Diego Costa en attaque.     

5. Un tirage délicat

Une revanche de la finale du Mondial-2010 face aux Pays-Bas pour commencer,  puis un duel face à une équipe du Chili qui l'avait malmenée en amical en  septembre (2-2): l'Espagne n'a pas hérité du groupe le plus facile.

L'ordre des matches a pu jouer, avec le plus gros morceau pour commencer,  sans que les Espagnols n'aient le temps de prendre leurs marques.

Enfin, le statut d'équipe à abattre a pesé sur les épaules des champions du  monde: "n'importe quelle sélection que nous affrontons veut faire du mieux  possible contre nous", résumait Casillas avant le Mondial.     

6. Un jeu devenu prévisible ?

"Nous allons gagner ou mourir avec ce style de jeu", avait prévenu Xavi. La  deuxième issue a prévalu.

Après six ans de domination, le "tiki-taka" ou "toque", jeu basé sur la  possession de balle et le redoublement des passes, avait d'ailleurs connu  d'autres désaveux ces dernières semaines: saison blanche au Barça et échec en  demi-finale de C1 du Bayern Munich, entraîné par l'ancien entraîneur  barcelonais Pep Guardiola.

De l'Atletico Madrid aux Pays-Bas en passant par le Chili, les adversaires  semblent avoir compris comment en venir à bout grâce au pressing et à la  contre-attaque. 

Quant à la défense de la Roja, solide lorsque les petits gabarits très  techniques tenaient le ballon au milieu de terrain, elle n'a plus été aussi  protégée qu'avant et a entraîné dans sa chute toute la maison d'Espagne.