Détenus sahraouis de Gdeim Izik : HRW et Amnesty International appellent à un procès équitable

Les ONG Human Rights Watch (HRW) et Amnesty International ont appelé, dimanche, à un procès équitable au profit des prisonniers politiques sahraouis du groupe Gdeim Izik, en détention arbitraire depuis 2010, considérant l'examen en cours de cette affaire par une haute juridiction marocaine, comme "un dernier recours pour remettre le procès sur la bonne voie".

Les détenus politiques sahraouis, ont " droit à une véritable justice, fondée sur un procès équitable et perçu comme tel", a déclaré Eric Goldstein, directeur par intérim de la division Afrique du Nord et Moyen-Orient à HRW.

La plus haute juridiction du Maroc examinait l’affaire de 19 Sahraouis arbitrairement emprisonnés depuis 2010, ont déclaré le 8 novembre Human Rights Watch et Amnesty International.

La Cour de cassation a examiné la décision d’une juridiction inférieure le 4 novembre, quatre jours avant le 10e anniversaire des faits à l’origine de cette affaire.

Les détenus sahraouis ont été condamnés tout d’abord par un tribunal militaire en 2013, puis par une cour d’appel civile en 2017.

"La Cour de cassation est le dernier recours pour remettre le procès de Gdeim Izik sur la bonne voie", a déclaré Eric Goldstein.

Le 8 novembre 2010, les forces de l’ordre marocaines ont démantelé sauvagement le campement de Gdeim Izik, qui comprenait environ 6.500 tentes installées par des Sahraouis un mois plus tôt pour protester contre les mauvaises conditions socio-économiques au Sahara occidental occupé par le Maroc depuis 1995, rappelle HRW dans un communiqué.

"Les forces de sécurité marocaines ont de façon répétée frappé et maltraité des Sahraouis arrêtées immédiatement après les faits.

Vingt-cinq Sahraouis ont par la suite été inculpés", indique le communiqué .

L’un de ces hommes a été libéré en 2011, et en 2013, un tribunal militaire a ordonné la libération de deux autres et condamné les 22 restants à de lourdes peines d’emprisonnement en se basant presque entièrement sur des aveux obtenus sous la torture".

Le Code pénal du pays interdit la torture, et son Code de procédure pénale prévoit que les aveux obtenus au moyen de la " violence" ou de la "contrainte" ne sont pas recevables devant les tribunaux.

Pourtant, souligne le communiqué de HRW, "les tribunaux marocains ont souvent fondé leurs verdicts sur des aveux sans avoir enquêté sur les affirmations selon lesquelles ces aveux avaient été obtenus au moyen de la torture ou d’autres formes de contrainte illégales".

En 2016, la Cour de cassation a annulé la décision rendue par un tribunal militaire contre le groupe Gdeim Izik au motif que ce verdict ne reposait pas sur des preuves concluantes.

L’affaire a été renvoyée devant une juridiction civile pour un nouveau procès.

En 2017, la Cour d’appel de Salé, près de Rabat, la capitale marocaine, a déclaré les 22 hommes coupables après soi-disant examen des nouveaux éléments.

Cependant, la défense a vigoureusement contesté les nouveaux éléments présentés ainsi que l’addition tardive de parties civiles, et elle s’est retirée du procès pour protester contre une " injustice flagrante", ont indiqué alors les avocats de la défense à HRW et Amnesty International.

Le Comité des Nations unies contre la torture a décidé en 2016, dans l’affaire qui lui a été soumise concernant l’un des accusés, Naâma Asfari, que "le Maroc n’avait pas enquêté sur les allégations de torture et que le tribunal militaire s’était basé sur des déclarations extorquées au moyen de la torture".

"Les tribunaux auraient dû enquêter rapidement sur les allégations de torture des accusés et non au bout de sept ans", a déclaré Amna Guellali, directrice régionale adjointe pour le Moyen-Orient et l’Afrique du Nord à Amnesty International.

"La procédure est entachée par l’absence de telles enquêtes et par l’admission d’aveux irrecevables à titre de preuves".

Deux des accusés ont été condamnés à des peines de réclusion qu’ils avaient déjà purgées, et libérés.

Les 20 autres, ont été condamnés à de lourdes peines allant de 20 ans d’emprisonnement à la réclusion à perpétuité à l'issue d'un simulacre de procès.

A la suite du verdict de ce tribunal civil, les 19 prisonniers, qui étaient jusqu’alors détenus dans la même prison à Salé, ont été transférés dans différentes prisons à travers le Maroc.

Plusieurs d’entre eux ont depuis mené de façon répétée des grèves de la faim pour protester contre les abus dont ils ont l’objet, notamment la privation de soins médicaux ou de visites de leur famille et le placement abusif en détention à l'isolement.

D'après HRW, la Cour de cassation ne réexamine pas les faits, mais uniquement les questions de procédure, les abus de pouvoir et l’application erronée de la loi.

La Cour, dont la décision est attendue le 25 novembre, peut annuler le verdict, comme elle l’a fait en 2016, et ordonner un nouveau procès.

Dans le cas contraire, le verdict rendu en 2017 par la Cour d’appel de Salé sera considéré comme définitif. APS

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